La reconversion des prisons Saint-Paul et Saint-Joseph, situées à la confluence du Rhône et de la Saône, a fait l'objet d'un appel à idées qui a démontré qu'une réutilisation du site préservant l'intérêt patrimonial était économiquement viable avec des propositions de réutilisations multiples.

Le contexte

La prison Saint-Joseph, construite par Louis Pierre Baltard entre 1827 et 1831, est conçue sur un plan orthogonal pavillonnaire en peigne, issu de l'architecture hospitalière. L' ensemble est composé de 6 pavillons, construits en maçonneries enduites et de parties en pierres de taille (pierre de Préty et pierres dorées). Les 6 pavillons sont reliés par des galeries en pierres de Villebois.

Conçu dans une architecture néoclassique, les formes massives sont destinées à démontrer la force de l'institution, en particulier le pavillon administratif d'entrée et le pavillon central, en pierre de grand appareil.

La prison Saint-Paul, construite entre 1860 et 1865 par Antonin Louvier, architecte départemental du Rhône, est organisée sur un système de 6 bâtiments rayonnants autour d'une rotonde centrale de surveillance surmontée d'une chapelle. Elle est construite entièrement en pierres de taille (pierre dorée et Villebois).

Lyon prisons Saint-Joseph et Saint-Paul plan de masse ancien

La démarche de projet

En 2008, le ministère de la Justice décide de vendre l'ensemble des prisons suite à la construction d'une nouvelle prison à Corbas, en périphérie lyonnaise. Un rapport de l'inspection des monuments historiques remis la même année précise: "l'intérêt principal des édifices relève surtout de l'exceptionnelle qualité d'ensemble qui [...] illustre à elle seule toute l'histoire de la pensée carcérale du XIX° siècle et de sa transposition dans la pierre". Ce rapport souligne "l'intérêt patrimonial prioritaire de l'ensemble constitué par les deux prisons" mais leur conservation intégrale semble impossible, car trop contraignante".

En octobre 2008, la commission régionale du patrimoine et des sites (CRPS) examine le dossier et propose un processus d'étude et de réutilisation. Un permis de démolir est déposé en févier 2009, et retiré suite aux demandes des associations et à l'avis de l'architecte des Bâtiments de France qui demande "un diagnostic patrimonial et programmatique en vue d'une mutation raisonnée conjuguant héritage et modernité."

Le cahier des charges

En mai 2009, un cahier des charges est élaboré. Il indique que le projet doit s'intégrer dans le contexte urbain, notamment le projet Confluence, qui vise à rénover un quartier dans son intégralité. Le cahier des charges définit les hauteurs constructibles maximales (25 m au sud sur le cours Suchet - 35m côté voies ferrés au nord) et une exigence d'ouverture et de porosité des îlots. Enfin, il pose les enjeux patrimoniaux avec des invariants, à savoir le respect de la morphologie des deux anciennes prisons, la conservation de la trace de l'enceinte pour les deux îlots. Pour la prison Saint-Joseph la nécessité de conserver la rotonde centrale avec sa chapelle, les pavillons d'entrée et le pavillon central ouest ainsi que les galeries de distribution à colonnades. Pour la prison Saint-Paul la rotonde centrale avec les escaliers de distribution des ailes et le portail d'entrée.

L'appel à idées ouvert

La complexité du site a incité le préfet à lancer un appel à idées, ouvert à tous, en septembre 2009. L'appel à idées a pour avantage d'inviter différents acteurs à réfléchir de façon ouverte sur une question posée. Des réponses très diverses ont été apportées par des architectes, des équipes promoteur architecte, des associations : cet appel à idée a montré qu'une réutilisation du site préservant l'intérêt patrimonial était économiquement viable avec des propositions de réutilisations multiples.

L'appel à candidature en vue de la cession

De février à décembre 2010, cinq projets ont concouru associant promoteur, architecte et architecte du patrimoine. Le choix s'est porté sur le programme le plus riche et le plus qualitatif pour le site tout en respectant le prix demandé. Cela s'est fait au détriment d'un projet plus respectueux du patrimoine, mais avec un programme plus banal et un prix d'achat nettement inférieur au prix fixé par France Domaine.

La réalisation

Pour la prison Saint Paul, le choix s'est porté sur le projet de la SOFADE mandataire associé à l'Université catholique avec l'agence d'architecture Garbit Blondeau et Blondin architecte du patrimoine. Le parti architectural consiste à construire les bâtiments neufs sur le pourtour à l'emplacement de l'enceinte, très partiellement conservée et à créer une grande « rue couverte » traversante d'ouest en est. Deux ailes complètes et trois ailes partielles ont été réutilisées ainsi que la rotonde centrale, point de desserte de toute l'université, surmontée de la chapelle d'origine qui retrouvera son affectation.

Pour la prison Saint Joseph, c'est le projet de l’OPAC, Habitat et Humanisme et OGIC qui est retenu: 10000 m² de bureaux, 90 logements, 65 logements sociaux et une résidence étudiants de 108 chambres avec l’agence Ory et F. Didier, architecte en chef des monuments historiques.

Ont été conservés, la partie centrale d'origine avec ses bâtiments est et ouest, l'ensemble des portiques et la rotonde centrale. Cinq pavillons en peignes ont été remplacés par des immeubles neufs.

Lyon prisons Saint-Joseph et Saint-Paul plan projet

L'histoire dira si la conservation d'un tiers des bâtiments anciens garde un sens fort de mémoire architecturale, ce qui est à ce jour mon opinion, ou si ce n'est qu'un alibi pour une destruction non assumée. Enfin, on peut se demander si une protection au titre des monuments historiques aurait permis une réutilisation plus importante de ce patrimoine du XIX° siècle.

Pierre Franceschini, Architecte des bâtiments de France

Fiche projet

Saint-Paul : Garbit et Blondeau architecte - Promoteur UCLY

Saint-Joseph : Restauration Frédéric Didier, architecte en chef des monuments historiques

Parties neuves:  Ory architecte – Promoteur OGIC