Cher Bruno Ory-Lavollée,

Je suis heureux aujourd'hui de rendre hommage aujourd’hui, dans les
salons du ministère de la Culture et de la Communication, à un grand
serviteur de l’Etat.

Diplômé de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris, de HEC et de l’ENA
(promotion Léonard de Vinci, en 1985), votre premier poste de direction à
la culture a été celui de directeur général du Centre Pompidou.

Dans votre parcours remarquable, je voudrais insister sur un point : vous
aurez saisi très tôt, plus que quiconque, la logique des réseaux
numériques, les enjeux de leur fonctionnement, l’impact de ces logiques du
virtuel sur notre monde réel. De vos propres mots, « nous sommes
aujourd’hui dans une société de réseaux, où chacun est non seulement
récepteur, mais aussi auteur d’informations qu’il diffuse, où la
communication est constituée de ces flux d’informations continuellement
repris ».

Alors que vous dirigez la Comédie Française, en mai 2001, vous êtes
chargé sous l'impulsion de Catherine Tasca d'une importante réflexion sur
« la mise à disposition sur les réseaux des données publiques
essentielles ». Vous formez très rapidement autour de vous un comité de
pilotage restreint qui vous aidera à rendre en janvier 2002 votre rapport sur
« la diffusion numérique du patrimoine, dimension de la politique
culturelle ». Certaines de vos recommandations ont alors été très
rapidement mises en oeuvre, grâce notamment à la création du portail
www.culture.fr .

En 2004, vous devenez Conseiller Maître à la Cour des comptes. Vous
êtes alors placé en disponibilité afin d’exercer les fonctions de directeur
général de la société civile pour l’administration des droits des artistes, des
musiciens et des interprètes (ADAMI). Jusqu’en septembre 2008, vous
représentez ainsi la société dans tous ses actes à l’égard des tiers et des
associés et vous engagez toute action judiciaire tant en demande qu’en
défense intéressant la société ou les droits dont elle a statutairement la
charge.

Parallèlement à vos fonctions de gérant de l‘ADAMI, Jean-François Hebert,
alors directeur de cabinet du ministère de la Culture et de la
Communication, vous confie en 2008 la co-présidence, avec le secrétaire
général Guillaume Boudy, d'un groupe de travail réunissant les
représentants des directions et des principaux établissements publics
détenteurs de fonds, ainsi que des personnalités qualifiées (Autorité de la
concurrence, Commission d’accès aux documents administratifs, Conseil
supérieur de la propriété littéraire et artistique...), en présence de membres
du Cabinet. Six ans après la remise de votre premier rapport, vous allez
ainsi donner une continuité précieuse à votre réflexion sur le numérique.

C'est avec ce même sens de l'engagement en faveur de la politique
culturelle numérique que vous souhaitez assurer pleinement la coprésidence
de ce groupe de travail de haut niveau, et ce malgré vos
importantes responsabilités professionnelles.

Cette mission, stratégique et technique, réclamait précisément une
connaissance fine de ces problématiques. Encore une fois, vous avez a su
les conjuguer avec un sens exemplaire de l’ouverture, indispensable au vu
de la variété des acteurs impliqués. Avec votre talent de rassembleur, vous
avez a ainsi pu persuader d'éminents membres d'institutions publiques de
se joindre à vous dans le comité de pilotage. Vous avez surtout apporté la
richesse de votre expérience dans le choix des auditions réalisées par le
groupe de travail.

À l'issue de ce travail de réflexion important et de concertation, vous avez
remis le 9 juillet 2009 votre deuxième rapport intitulé « Partager notre
patrimoine culturel. Propositions pour une charte de la diffusion et de la
réutilisation des données publiques culturelles numériques ». Il offre une
remarquable synthèse des grands principes de nos politiques en matière
de diffusion numérique des contenus culturels publics et d’outils
opérationnels permettant d'apporter une réponse rapide, légale, homogène
selon les secteurs, les types d'usage et les modes de réutilisation, en
favorisant la reprise des contenus numérisés aussi bien par les entreprises
privées, les particuliers ou par d'autres institutions publiques. Ces
recommandations s’inscrivent au coeur des enjeux stratégiques énoncés
dans la lettre de mission envoyée par le Président de la République et le
Premier ministre à mon prédécesseur Christine Albanel ; elles permettent
de positionner notre Ministère au sein d'une politique gouvernementale du
numérique et d'adapter ses missions traditionnelles aux médias actuels.

Vous vous accomplissez pleinement dans chacune de vos fonctions, où
vos compétences et votre goût pour la culture vous permettent de relever
avec efficacité et succès les défis de chantiers lourds et complexes, tout en
animant avec beaucoup de conviction et d’enthousiasme des équipes
passionnées.

Vous avez également participé à la réflexion stratégique et prospective
Culture & Médias 2020, pilotée par le secrétariat général du ministère. Cet
exercice à grande échelle, dont les conclusions seront remises très
prochainement, faisant suite à un exercice de prospective inédit piloté par
le département des études, de la prospective et des statistiques du
ministère, a permis d’explorer les futurs possibles de nos politiques
culturelles de l’État afin de mieux identifier les enjeux sur lesquelles elles
devront porter à l’avenir, en anticipant sur leurs évolutions. Ce souci de la
prospective et de la réflexion qui doit nourrir la prise de décision publique,
je sais qu’il est également le vôtre en tant que vice-président du conseil
ministériel des études.

En 2011, la Fondation pour la sauvegarde et le développement du
domaine de Chantilly vous accueille comme nouveau directeur, et votre
arrivée constitue pour beaucoup une bonne nouvelle. La Fondation, créée
en 2005 à l'initiative généreuse de l'Aga Khan, avait besoin de retrouver un
second souffle entre la gestion du château, de son parc et de ses jardins,
la poursuite des importants travaux de rénovation, et des Grandes Ecuries
qui abritent le musée vivant du cheval. Avec votre plan stratégique et votre
capacité à repérer les marges de progression, vous allez poursuivre le
travail engagé par Danièle Clergeot qui avait commencé à relancer la
fréquentation de Chantilly ; et je ne doute pas que vous allez redonner,
avec l’appui de votre adjoint François Belfort, tout son éclat au plus grand
domaine privé de France, possession de l’Institut de France – tout en
restant fidèle à la volonté du duc d’Aumale de préserver l’esprit des lieux.

Bruno Ory-Lavollée, bon nombre d’entre vous le savent, est également un
excellent pianiste, formé à Paris à l’Ecole normale de musique Alfred
Cortot : vous avez été finaliste du Concours international des Grands
Amateurs de piano en 1997. Votre passion pour la musique vous avait
poussé en 1993 à créer à Compiègne, votre ville natale, le Festival des
forêts. Vous continuez à assurer la présidence à titre bénévole de ce beau
festival de musique classique.

En homme engagé, rigoureux et résolument ancré dans son temps, vous
avez toujours été au service d’une même exigence, celle de l’avenir de la
culture. Grand serviteur du ministère de la Culture et de la Communication,
vous lui apportez le charme de votre personnalité, votre force de caractère
et votre savoir.

Cher Bruno Ory-Lavollée, au nom de la République française, nous vous
faisons Commandeur de l’Ordre des Arts et des Lettres.